Pendant longtemps, on m’a qualifiĂ©e de timide, de rĂ©servĂ©e car on ne comprenait pas que je puisse apprĂ©cier ma propre compagnie et me sentir mal Ă l'aise avec beaucoup de monde. Mon adolescence s'est rĂ©sumĂ©e Ă naviguer entre savoir ce qui Ă©tait bon pour moi et m'essayer Ă me conformer Ă la masse. Je suis passĂ©e Ă cĂŽtĂ© de quelques opportunitĂ©s et de belles relations Ă cause de ce cĂŽtĂ© rĂ©servĂ©, de cette peur de sortir de ma zone de confort et d'ĂȘtre jugĂ©e pour ça. J'ai longtemps eu ce sentiment de ne pas, malgrĂ© ma volontĂ©, entrer dans le moule de cette sociĂ©tĂ© qui veut que la norme soit Ă l’extraversion. L'impression de ne pas ĂȘtre normale car n'ayant pas les mĂȘmes aspirations que les autres. Un sentiment partagĂ© par bien d'autres adolescents et peut-ĂȘtre mĂȘme de jeunes adultes.
J'ai mis plusieurs dĂ©cennies Ă le comprendre, Ă l'accepter et ce n'est que rĂ©cemment que j’ai mis un mot sur ce qui reflĂšte parfaitement ma façon d’ĂȘtre : je suis introvertie. J’ai cette tendance Ă prĂ©fĂ©rer les cercles restreints, les activitĂ©s en terre connue, sans trop de foule, Ă me ressourcer en Ă©tant seule et Ă beaucoup rĂ©flĂ©chir. Je fais partie de cette catĂ©gorie de personnes incomprises.
SoirĂ©es animĂ©es, conversations superficielles, copiner avec les collĂšgues et autres exercices de sociabilisation qui paraissent normales et nĂ©cessaires aux yeux de la sociĂ©tĂ© peuvent Ă©puiser un introverti et devenir de rĂ©elles Ă©preuves. J’apprends encore aujourd’hui, trentenaire confirmĂ©e, Ă apprĂ©cier les atouts de l'introversion. J'apprends Ă©galement que d'autres introvertis peuvent fonctionner diffĂ©remment et que les extravertis ne comprennent pas toujours nos attributs.
C’est
la lecture du bouquin de Laurie Hawkes qui m’a confortĂ© dans cette dĂ©marche
d’acceptation parce que, contrairement aux croyances populaires, ĂȘtre introverti est bel et bien une force.
Effectivement,
la sociĂ©tĂ© met en avant les extravertis qui « trouvent leur semblables normaux et jugent les introvertis froids,
sauvages ou ennuyeux ». Ce sont des a priori que l’auteure dĂ©monte Ă
l’aide de plusieurs exemples Ă travers son ouvrage. Elle poursuit :
« Les introvertis s’Ă©tonnent de la
dépendance des extravertis, qui ont tellement besoin de voir du monde. Chacun
peut considĂ©rer l’autre comme Ă©trange, par certains cĂŽtĂ©s. L’introverti ne
serait pas assez sociable, l’extraverti ne serait pas assez indĂ©pendant, ou pas
assez serein ».
Il est d’ailleurs Ă©trange de voir comment on reproche plus volontiers un comportement introverti alors qu’on met plus facilement en valeur un comportement extraverti ! Les fameuses reflexions du genre "Tu devrais sortir plus souvent, ça te ferai du bien", "Mais qu'est-ce que tu as, tu ne parles pas beaucoup", "Oh c'est dommage de rester dans ton coin/chez toi".
De mĂȘme, on a pu voir que la pĂ©riode de confinement imposĂ©e Ă tous a Ă©tĂ© mieux vĂ©cue par les personnes introverties, plus habituĂ©es Ă se sentir Ă l'aise en dehors de la sphĂšre professionnelle, moins dĂ©pendantes des autres.
On
a souvent tendance Ă se mĂ©prendre sur ceux qu’on qualifie d’introvertis comme par exemple avec le prĂ©sident amĂ©ricain Obama Ă qui certains reprochaient de ne pas aimer
les gens car moins familier que Bill Clinton ou George W. Bush Ă cause de son
manque d’exubĂ©rance. Le blogueur amĂ©ricain Andrew
Sullivan rĂ©pondait en 2012 Ă l’affirmation selon laquelle les introvertis
n’aiment pas les gens, que c'Ă©tait une vision erronĂ©e. « Certes, les introvertis prĂ©fĂšrent la solitude
et ont tendance à réfléchir dans leur for intérieur, alors que les extravertis
préfÚrent la multitude et réfléchissent plutÎt ouvertement. Un introverti peut
trĂšs bien aimer les gens mais ne pas ĂȘtre Ă l’aise dans la foule. Et un
extraverti peut ĂȘtre trĂšs Ă l’aise dans la foule mais ne pas aimer les gens qui
la composent, ou certains d’entre eux. L’introversion et l’extraversion
dĂ©crivent une prĂ©fĂ©rence innĂ©e pour un environnement, pas l’amour qu’on Ă©prouve
ou non envers les autres. »
« Je suis maintenant
convaincue que les introvertis peuvent exercer une influence Ă©norme dĂšs lors
qu’ils cessent d’essayer de se comporter en extravertis et qu’au lieu de cela,
ils exploitent pleinement leurs forces tranquilles naturelles ».
Le livre dĂ©montre Ă travers plusieurs chapitres comment ĂȘtre introverti est un avantage dans ce monde de survoltĂ©s. De plus les caractĂ©ristiques positives sont inombrables ; ils sont bien souvent bons Ă©lĂšves, attentifs Ă autrui car compatissants, autonomes et Ă©motionnellement autosuffisants et donc moins esclaves des modes, ne cherchent pas Ă attirer l'attention, sont intĂšgres et loyaux, entre autres atouts.
Certaines célébrités sont introverties et cela n'est en rien une entrave à leurs accomplissements à l'exemple du fameux titre Here d'Alessia Cara qui l'illustre parfaitement.
L’auteure nous
invite Ă arrĂȘter de juger et Ă apprĂ©cier les avantages de cette force d’Ăąme.
Cet
ouvrage vous permettra de mieux comprendre les agissements de certains de vos
proches ou de mieux appréhender vos propres attributs.
« Beaucoup de gens n’ont pas l’air introverti
et ne sont pas identifiĂ©s comme tels parce qu’ils sont par exemple trĂšs animĂ©s
en soirĂ©e avec leurs amis. Pourtant, ils ont des besoins d’introvertis qu’ils
ignorent parfois eux-mĂȘmes et qu’ils risquent donc de nĂ©gliger. Leur entourage
aussi méconnait cet aspect de leur personnalité et les pousse à sortir
davantage, Ă voyager, les accuse d’y mettre de la mauvaise volontĂ©, d’ĂȘtre
paresseux ou déprimés. Il est donc crucial de reconnaitre, en soi ou chez ses
proches, ces besoins d’introverti, afin de les respecter ».
Il
est vrai qu’on encourage souvent Ă « vivre
une existence trĂšs active faite de nombreuses sorties si l’on se place du point
de vue d’une norme hyperactive. Mais acquĂ©rir de toute Ă©vidence une certaine
sérénité pour ne pas avoir à fuir le face-à -face avec son propre monde
intĂ©rieur ne peut qu’ĂȘtre enrichissant ! Cela nĂ©cessite souvent un
apprentissage, car notre monde actuel ne met guĂšre l’accent sur la capacitĂ© Ă
se sentir bien seul ».
Le livre est facile Ă lire et je le recommande fortement, notamment Ă l'attention des parents d'enfants introvertis, parfois malheureux car incompris.
J'ai personnellement appris récemment que j'étais également hypersensible, ce qui est une réponse à certaines réactions que je jugeais étranges face à des situations passées. Il s'agit enfin, avec ce livre, de s'approprier pleinement ce que la masse considÚre comme anormal, asocial ou différent.
Il est trĂšs intĂ©ressant aussi de comprendre que plusieurs personnes peuvent ĂȘtre introverties de maniĂšre complĂštement diffĂ©rente. Soyons attentifs surtout face aux plus jeunes, moins dans le jugement et plus dans la comprĂ©hension. Pour aller plus loin, je vous conseille aussi le test de personnalitĂ© MBTI.
Introvertie
et, enfin, fiĂšre de l’ĂȘtre !
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